Le maître mot de l’entreprise française de grande distribution ? Proximité ! Acteur essentiel des centres-villes du pays, le groupe Casino prône la proximité pour l’intégralité de ses collaborateurs, de ses marques et de leurs points de vente.
La team We Are COM a eu la chance d’échanger avec Christophe Piednoël, Directeur Communication, affaires publiques, RSE du Groupe Casino. Communication de marque, défis internes et externes, politique RSE, gestion de crise… Une réflexion inspirante sur l’univers de la communication et ses challenges.
Bonjour Christophe, quelle définition donneriez-vous à la communication de marque ?
La marque est un drapeau. D’une part, elle est garante d’une appartenance en interne, une appartenance sous laquelle les collaborateurs se fédèrent, à l’image des citoyens d’un pays. D’autre part, elle génère de l’émotion auprès de l’externe, permettant alors aux différents publics de s’y identifier.
Le rôle de la communication de marque, c’est de gérer, développer et préserver ce drapeau.
La marque est un drapeau.
Comment est organisée votre Direction de la communication ?
Le Groupe Casino a entamé un projet de restructuration. Notre Direction de la communication sera mutualisée, elle œuvre pour l’ensemble des entités du groupe et devient ainsi gage de cohérence et de performance de l’intégralité de nos communications.
Néanmoins, chacun des territoires d’expression spécifiques à nos marques sont respectés. Celles-ci jouissent d’un puissant imaginaire et d’un ADN qui leur est propre. Notre Direction de la communication est en charge de la cohérence de l’image du groupe.
Justement, de quelle manière coordonnez-vous les communications des multiples enseignes du groupe ? Comment émerge la prise de parole groupe ?
En fonction de la spécificité des sujets, les porte-parole peuvent varier. La Direction générale prendra davantage la parole sur les aspects structurants et stratégiques du groupe, tandis que les thématiques transverses seront davantage confiées aux experts métiers. Nos différentes marques disposent par ailleurs de porte-parole pour communiquer sur leurs territoires spécifiques.
A l’heure de la réorganisation interne au sein du groupe Casino, quels sont vos grands défis en externe et en interne ?
Défi, c’est le mot ! Notre plan stratégique présente une triple ambition : restructurer, consolider et développer le groupe.
Encore une fois, nous avons misé sur la cohérence. Aujourd’hui, suite à notre cession de nos hyper et supermarchés, l’intégralité de nos marques sont des commerces de proximité (Monoprix, Franprix, Casino, Cdiscount, Naturalia, … ). Ce parti pris est en phase avec les tendances actuelles de consommation qui plus que jamais sont affinitaires.
En effet, deux modèles de consommation s’opposent : le commerce d’éloignement, celui qui nécessite de se déplacer en voiture et dont le succès est uniquement fondé sur le prix, et le commerce de proximité, un commerce de plus en plus attractif où le client se rend dans un magasin qui lui ressemble.
Concernant l’interne, là encore le défi est de taille, puisqu’il nous faut embarquer 27 000 collaborateurs dans cette nouvelle aventure. Pour mener à bien un projet en externe, il est indispensable de fédérer l’interne en lui apportant toutes les explications nécessaires à la compréhension des enjeux et du rôle de chacun.
Les tendances actuelles de consommation sont plus que jamais sont affinitaires.
D’ailleurs, côté communication interne, comment engager les collaborateurs Casino en France ?
Actuellement, se déploie une stratégie interne axée autour des trois axes fondamentaux que sont la transparence, la confiance et l’esprit d’initiative. Celles-ci sont poussées auprès des collaborateurs, afin de réinscrire le groupe dans une trajectoire de commerçant. Être commerçant est le cœur de notre métier. Nous devons simplement redevenir commerçant.
Plus concrètement, ce travail est un travail managérial. Je suis convaincu que la communication interne doit émaner d’un juste mélange entre la COM chaude et la COM froide. Dans un monde où nous nous sentons parfois un peu isolés par l’envahissement numérique, nous devons redonner une place à l’échange humain. Autrement dit, il faut savoir mettre nos outils de communication au service d’une relation managériale fondamentalement humaine.
Au sein du groupe Casino par exemple, nous allons développer nos productions vidéo, pour renforcer la proximité managériale.
Je suis convaincu que la communication interne doit émaner d’un juste mélange entre la COM chaude et la COM froide.
Plus précisément, comment le groupe Casino s’engage en matière de responsabilité (RSE) ?
La RSE demeure un des points forts du groupe Casino, pionner de nombreuses avancées responsables. Nous sommes, entre autres, à l’origine de la création du label « bien-être animal » des produits de la grande distribution.
Chez Casino, nous sommes également très fiers d’être un acteur majeur de la solidarité territoriale. Les commerces de proximité ont un véritable rôle sociétal à jouer dans le monde rural, comme en centre-ville. Pour renforcer cet ancrage territorial et aller plus loin dans nos engagements, nous allons développer de nouveaux services de proximité Les possibilités sont multiples !
Enfin, côté interne, la parité est presque parfaite avec 49% de collaboratrices.
En tant qu’expert de la communication de crise, comment anticiper, et le cas échéant, gérer une crise ?
Connaissez-vous le dicton : « on ne répare pas le toit de sa maison quand il pleut » ? 😊
Je dirais que pour gérer efficacement une crise, il est essentiel de disposer d’un bon véhicule et d’un bon pilote. Le véhicule, c’est la procédure, le dispositif préalablement pensé et élaboré par l’entreprise par temps calme. Le pilote, ce sont les experts en gestion de crise, ceux capables de gérer les réseaux sociaux et les parties prenantes au cœur de la tempête.
J’ajouterais qu’il est important de se fixer des objectifs lorsqu’une crise survient. Que faut-il préserver avant tout ? L’interne, l’image, les pouvoirs publics, le business ? On ne pourra pas tout faire. Quand une crise prend de l’ampleur, il est donc absolument nécessaire d’être collectivement clairs sur les objectifs à tenir.
Et n’oublions pas qu’une crise peut parfois engendrer un rebond positif.
On ne répare pas le toit de sa maison quand il pleut !
D’après vous, quelles seront les futures grandes évolutions de la communication, notamment dans le domaine de la grande distribution ?
L’impact du numérique sur nos métiers est évidemment très puissant. L’IA bouleverse positivement la communication par tous les moyens qu’elle apporte. Toutefois, il nous faut rester vigilant face à toutes les nouvelles dérives qu’elle génère également.
Une autre question se pose, celle des sources d’informations. De plus en plus, les médias classiques et journalistiques se voient délaissés au profit d’autres sources d’informations moins qualitatives, voire même manipulées, telles que les réseaux sociaux. J’estime que les directions de la communication ont aujourd’hui tout intérêt à faire (ré)émerger un journalisme de qualité.
Comment lutter contre ces types de désinformation ? En détectant le plus rapidement possible l’information biaisée, grâce à une bonne culture de prévention et d’alerte. Le facteur temps est absolument déterminant en situation de crise. Il n’existe rien de pire qu’un super communiqué de presse, validé et revalidé, qui parait 24h après la bataille.
Diriez-vous que les marques ont un rôle politique à jouer ? De quelle manière peuvent-elles influer sur la société ?
C’est un vrai sujet, notamment en ce qui concerne les grands groupes internationaux.
L’économie mondialisée n’est plus d’actualité, aujourd’hui, émerge une économie de bloc : bloc démocratique ou non démocratique, bloc occidental ou bloc asiatique, etc. Aussi, lorsqu’une entreprise est interpelée sur les réseaux sociaux pour prendre une posture politique, elle subit des pressions contradictoires selon la ligne politique des pays dans lesquels elle est implantée. Elle est sommé de prendre parti. Et rappelons que ne rien dire est une prise de position, que le silence est un message.
Ces sujets sont de véritables problématiques pour les directions de la communication. Il serait nécessaire de les mettre plus régulièrement à l’ordre du jour des Comex. Quelles valeurs défendons-nous ? Et que sommes-nous prêts à faire ou ne pas faire pour défendre ces valeurs ? Vaste question !
Ne rien dire est une prise de position, le silence est un message.
Pour finir, acceptez-vous de nous livrer un conseil en communication ?
La communication est un secteur dans lequel il faut voir loin. Ne surréagissez pas à l’actualité quotidienne, ne sucombez pas à l’immédiateté. Mieux vaut se concentrer sur ce qui est important que sur ce qui est urgent. Alors, fixez-vous des objectifs clairs et regardez loin.
3 choses à savoir sur Christophe
Ses sources d’inspiration au quotidien ? Christophe est guidé par ses valeurs, il veut faire des choses auxquelles il croit. C’est pour lui une vraie source de satisfaction de pouvoir aligner ses valeurs personnelles à celles de son entreprise.
Son média préféré ? La machine à café. Sa dernière lecture inspirante ? « La guerre de l’information », de l’historien David Colon, un livre à la fois intéressant, documenté et inquiétant.
Sa publicité préférée ? Le gorille Cadbury, qui joue à la batterie un solo de Phil Collins. Il n’en faut pas plus pour l’émouvoir.
Ses passions et engagements ? Christophe est féru de plongée sous-marine, notamment avec les requins. Il l’affirme : « les requins sont bien plus inoffensifs sous l’eau que sur l’eau » ! Côté engagement, justement, il a effectué des missions scientifiques auprès des requins en Polynésie.